Deuxième ville du pays, mais très loin derrière Tunis, Sfax est un gouvernorat de 1 million d’habitants dont 600 000 dans l’agglomération. La métropole, bordée par la mer à l’Est, s’étend jusqu’à 14 km du centre, selon un plan semi-radioconcentrique qui se développe en doigts de gant, générant cinq auréoles qui rappellent à plusieurs égards le modèle de Von Thünen :
- un centre tripolaire densifié et minéralisé, il comprend le centre historique (la Médina de 24ha), le quartier colonial (47 ha) gagné par poldérisation sur la mer et Sfax-el Jadida (Sfax la nouvelle) qui jouxte la Médina, créé dans les années 1990-2000 comme un nouveau centre.
- une zone péricentrale, formée par les faubourgs anciens (Rbadh) en voie de mutation urbaine et sociale (verticalisation, tertiarisation).
- des Jenens « vergers » parsemés d’habitat pavillonnaire qui s’étendent jusqu’à 9 km du centre, formant une auréole dense à proximité du péricentre et plus lâche en périphérie, témoignant de la poussée de l’urbain et des héritages successoraux.
- la Boura, terre agricole de vergers (amandiers, figuiers, etc), qui s’étend du kilomètre 9 jusqu’à 16 km du centre, sans habitat autrefois, est submergée actuellement par la prolifération d’une urbanisation illégale et d’une spéculation foncière favorisant l’étalement de la ville.
- une ceinture d’oliviers qui s’étend sur plus de 60 km de rayon, et compte plus de 7 millions de pieds d’oliviers, fruit d’un front de colonisation franco-sfaxienne (1892-1956) faisant de la forêt d’olivier de Sfax l’une des plus étendues de la Méditerranée.
Ville industrielle et industrieuse, Sfax représente une centralité économique importante. Elle représente 15% du poids industriel national, 40% de la production nationale d’huile d’olives et constitue le premier port de pêche du pays. Le tissu économique sfaxien est principalement l’œuvre du capital local dont les acteurs forment une communauté soudée. Ville de petits métiers et de petite industrie, mais ancien centre d’industrie chimique (dérivés de phosphate), Sfax est à bien des égards l’atelier du pays (réparation, usinage, solutions mécaniques, etc). Cette activité a généré des externalités négatives, telles que la pollution et un problème de gestion des déchets. La ville rencontre aujourd’hui de nombreux obstacles à son développement et peine à se hisser au rang des grandes métropoles internationales méditerranéennes.
La ville est davantage tournée vers la mer que vers le continent. Cette identité maritime s’entend jusque dans les patronymes, d’origines grecque, turque, syrienne ou italienne. A Sfax les problématiques de mobilité locale, régionale et internationale constituent un prisme particulièrement fécond pour analyser les transformations urbaines :
- les mobilités quotidiennes dans la ville se caractérisent par la prédominance des transports individuels et privés (automobiles, mobylettes, taxis), ce qui génère d’importants problèmes de congestion, le long des 15 radiales. La ville subit de plein fouet les retombées de la lenteur et du retard de réalisation des grands projets d’aménagement (Taparura, métro léger, etc…).
- la ville est également une centralité migratoire importante, qu’il s’agisse des migrations internes du rural vers la ville, de l’installation ou du passage de personnes provenant de Libye et, plus récemment de l’arrivée de migrations provenant d’Afrique subsaharienne.
- Sfax n’est pas une destination touristique classique mais est le lieu d’un important tourisme médical qui se développe depuis les années 1990 et a contribué notablement à son développement économique et urbain.
- Enfin, la ville est un laboratoire de l’articulation des circulations humaines et non humaines. La circulation des fripes et la circulation des déchets, dont le commerce anime une partie de la ville, en constituent de bons exemples.
écrit par Ali Bennasr et Sami Ben Fguira.
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